Quelle pourrait être une approche intelligente des yama-s ? par François Lorin

Conférence en ligne de François Lorin – organisée par l’UEY en avril 2023.

Patanjali dans le yoga sûtra présente les huit membres du yoga dans le chapitre intitulé sâdhana comme étant ce qui conduit à l’avènement du discernement : viveka.

Dès lors la tentation c’est d’interpréter cette invitation comme devant conduire à une mise en pratique de ce qu’il énonce. Pour commencer avec le premier membre : yama-s, les maîtrises, il s’agirait de mettre en pratique…

l’absence de désir de nuire : ahimsâ ;
s’en tenir strictement à ce qui est vrai : satya ;
s’abstenir de prendre ce qui ne nous appartient pas : asteya ;
conserver notre énergie en vue de réaliser l’état de yoga : brahmacharya, et enfin
de ne pas posséder ce que la vie nous offre : aparigrahâ.

Mais est-ce là une approche possible, intelligente ? et cela ne nourrit-il pas le refoulement et la frustration ? Si c’est le cas, quelle serait l’approche adéquate de ce premier membre et par conséquent celle des sept autres membres ? Cela pose aussi la question du rapport entre le yoga de l’action, énoncé au début de ce même chapitre et des huit membres, dont cinq seulement sont énoncés dans sâdhana pâda, les trois derniers l’étant dans le troisième chapitre : vibhûti pâda.

« Si on se dit que les Yama-s c’est un peu comme les dix commandements, c’est-à-dire ce sont
des choses qu’il faut suivre donc se forcer… ou bien on réussit ce qui est peu probable, et ça
fait naître un sentiment d’orgueil (c’est à dire que qui est le personnage orgueilleux c’est celui qui croit avoir réussi quelque chose mais ce faisant qui augmente encore l’identification au personnage) donc tourne le dos encore plus à ce qu’il cherche à découvrir, ou en échoue, et là c’est le sentiment de culpabilité, c’est le sentiment de d’impuissance et là aussi c’est un obstacle majeur parce que qui se sent coupable n’a pas l’esprit clair et n’a pas l’esprit tranquille.

Donc il faut regarder les Yama-s autrement, et pour moi ça a été très éclairant le jour où des Desikachar a dit « les Yamaha tel que le décrit Patanjali – d’ailleurs les autres yama-s aussi – c’est le portrait d’un être humain qui est un yogi abouti » c’est à dire ça nous donne en quelque sorte l’image de ce vers quoi l’humanité tend mais au sein de l’humanité il y a très peu d’êtres humains qui sont parvenus jusqu’au bout de ce processus de changement intérieur.
[…]Si on prend les Yamaha non plus comme des obligations mais comme autant de miroirs pour regarder où on en est en termes de clarté intérieure et de d’action juste là ça devient intéressant… »